Spotify, Deezer, Apple Music… Si les plateformes de streaming semblent régner sur l’industrie musicale depuis quelques années, les chiffres de croissance stagnent depuis plusieurs mois. Comment expliquer cette nouvelle tendance ?
Un marché arrivé à maturité ?
Après plus d’une décennie de croissance fulgurante, le streaming musical en France marque un sérieux coup d’arrêt. Selon les derniers chiffres du SNEP, les revenus générés par le streaming au premier semestre 2025 n’ont progressé que de 3,4 %. C’est une décélération nette par rapport aux +10,1 % enregistrés à la même période en 2024 et aux +10,4 % de 2023. Sur les vingt-quatre derniers mois, le taux de croissance annuel moyen du streaming s’établit à 5,85 %, loin des 20 % qui avaient caractérisé la période 2020-2023, déjà en ralentissement par rapport aux années 2016-2019. Le phénomène n’est pas isolé : aux États-Unis, au Royaume-Uni ou en Allemagne, les marchés dits “développés” montrent les mêmes signes d’essoufflement.
Dans le détail, le taux d’abonnement, qui représente 63 % des revenus du secteur, n’a augmenté que de 4,9 % sur la période, contre plus de 11 % un an plus tôt. Le streaming financé par la publicité ne fait guère mieux, et le streaming vidéo recule même de 6%, alors qu’il était encore en croissance en 2024. Les hausses de prix récentes des principales plateformes n’ont pas encore produit d’effet, et la question se pose : le marché a-t-il atteint un plafond ? La plupart des amateur.rice.s de musique sont déjà abonné.e.s, et la conquête de nouveaux utilisateurs devient plus difficile.
Un marché en mutation où le physique reprend des couleurs
Si le streaming ralentit, le marché global de la musique enregistrée continue pourtant de progresser, affichant +3,4 % sur un an au premier semestre 2025 pour atteindre 432 millions d’euros, soit 55 % de plus qu’en 2020. Cette dynamique est en partie portée par un retour en force du support physique. Les ventes d’albums physiques sont en hausse de 4,4 %, avec un spectaculaire +9,4 % pour les vinyles, après une quasi-stagnation l’an passé. Ce regain confirme l’attrait des fans pour des objets tangibles et des expériences plus “incarnées” dans un univers musical de plus en plus dématérialisé.
Autre bonne nouvelle pour la filière : la vitalité de la production française. Quinze albums hexagonaux figurent dans le top 20 des meilleures ventes du semestre. Des artistes confirmé.e.s côtoient une nouvelle génération prometteuse, dont plusieurs jeunes talents féminins qui placent leur premier album dans le top 20. Si le streaming reste dominant, pesant pour 80 % des revenus du secteur, cette diversification (entre abonnements, publicités, ventes physiques et production locale) permet au marché français de garder une dynamique positive. Pour les artistes, le message est clair : le tout-streaming n’est plus l’unique horizon, et miser sur une offre hybride, entre présence numérique et objets physiques, pourrait bien être la clé des prochaines années.